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26/10/2016

> Energie - Stockage

Stockage de l’énergie : Xerfi voit un avenir mitigé pour les acteurs français en dépit de la croissance du secteur

Le stockage d’énergie est considéré comme l’un des axes stratégiques du développement technologique en France. Et ce depuis plusieurs années, comme l’en atteste notamment la Commission Innovation 2030 (dont le bras armé est le concours mondial de l’innovation) dont c’est l’une des huit « ambitions ». Et de fait, le marché mondial pour toutes les technologies de stockage affiche une prévision de croissance monumentale. Mais Xerfi Research estime dans une toute récente étude sur le marché du stockage de l’énergie en France et dans le monde que la France restera assez largement à l’écart de cet essor, sauf à miser fortement sur l’export.

Avec les enjeux liés à l’intermittence des énergies renouvelables et à la mobilité électrique, pour n’en prendre que deux principaux, les besoins en stockage d’énergie électriques vont croissants. Selon la dernière étude de Xerfi Research, présentée en 24 octobre, la croissance de ce marché est exponentielle. Après un bond de 50 % à 1,85 GW en 2016, les capacités mondiales de stockage stationnaire par batterie (donc essentiellement pour les ENRà devraient ainsi être multipliées par 6,5 pour atteindre 12 GW à l’horizon 2020. Quant au marché des véhicules électriques, hybrides et/ou rechargeables (860 000 immatriculations en 2016), il devrait bondir de 50 % par an en moyenne d’ici à 2020, avec en conséquence une progression des ventes de batteries de 60 % par an sur la même période pour s’établir à 140 GW (contre 21,5 GW en 2016).

Dans ce contexte, la technologie Lithium-ion bénéficie bénéficie d’une place privilégiée qu’elle devrait conserver à moyen terme. Elle est cependant déjà challengée par d’autres approches, notamment selon Xergi les chimies sodium-ion, graphène, bromure d’hydrogène, qui cherchent à pallier certains points faibles de la filière lithium-ion, notamment son prix, sa recyclabilité ou les problèmes de risques (explosivité). L’étude souligne aussi l’émergence de solutions alternatives, notamment pour le stockage stationnaire et cite en particulier les volants d’inertie (filière pour laquelle la société française Levisys affiche une avance technologique certaine – Voir d’ailleurs ICI l’article paru dans Green News Techno sur cette start-up) ou l’approche Power to gas, qui consiste à convertir l’électricité en hydrogène comme voie de stockage.

En dépit d’une priorité affichée sur cette filière en France depuis de nombreuses années, et notamment via le rapport Innovation 2030, les experts de Xerfi restent plutôt pessimistes sur l’avenir industriel de cette filière en France. Le communiqué de Xerfi cite les difficultés potentielles d’industriels tels que Schneider Electric, Saft ou Forsee Power dans les filières de stockage pour l’autoconsommation, confrontées à la concurrence des pays asiatiques. Autre point mis en exergue, la bonne résilience du réseau électrique français qui se traduit par des besoins plus limités de stockage.  Mais ces experts ouvrent une porte à l’export, considérant que les acteurs français se montrent en dépit de cela ambitieux au plan mondial, en raison de leur expertise. Cela concernerait en particulier les acteurs en aval de la chaîne de valeur, tels qu’EDF Energie (qui a signé un accord avec un fabricant chinois de batteries) ou Neoen, développeur de projets d’ENR intégrant des capacités de stockage.

Cette vision exprimée par Xerfi est ainsi développée dans une étude fournie permettant d’apprécier les marchés, les technologies et le paysage concurrentiel à l’horizon 2020. On rappellera cependant qu’en matière de stockage d’énergie, nombre d’innovations peuvent contribuer à développer de l’activité économique d’acteurs français sur le territoire national ou à l’export, y compris au plan industriel, en dépit d’une structuration énergétique française qui peut paradoxalement être un certain frein à cette filière. On peut ainsi citer de nombreuses innovations. Sans être exhaustif, il y en a déjà plusieurs importantes sur des composants permettant d’améliorer la densité et la sécurité des batteries lithium-ion en plus des nouvelles chimies de stockage. C’est le cas des collecteurs de courant revêtus développés par Armor Group, des nanoparticules de silicium enrobé conçues par Nanomakers pour de nouvelles électrodes plus performantes ou des nanofils de silicium proposés par EnWires pour augmenter la densité des batteries. Il existe aussi plusieurs voies alternatives de stockage de l’électricité : c’est le cas de l’approche d’HySiLabs mettant en oeuvre la chimie des hydrures de silicium, mais aussi des conceptions innovantes intégrant l’hydrogène à l’image de l’offre de Sylfen, ou encore le stockage par air comprimé avec des start-up telles qu’Airthium, ou les batteries à électrolytes circulants telles qu’en développe la start-up Kemwatt –ex.Ionwatt. Et cela sans compter de nombreuses offres innovantes dans le monde du numérique optimisant ces problématiques de stockage (dimensionnement, pilotage). Autant d’innovations (qui ne sont que quelques exemples parmi d'autres régulièrement évoqués dans les pages de Green News Techno) qui vont répondre à des nouvelles tendances en matière de gestion et production d’énergie délocalisée et pour partie en auto-consommation, autant en France qu’à l’export. Cette diversité des innovations est donc telle en France dans le monde du stockage de l’énergie électrique qu’il paraît difficile d’être totalement défaitiste sur le déploiement possible du marché sur le territoire national. Et cela sans compter tout le potentiel de stockage d’énergie thermique, qui est un autre sujet à suivre en parallèle, tant les synergies entre les deux formes d’énergie sont importantes. 


Etude Xerfi : "Le marché du stockage de l'énergie en France et dans le monde. Stockage stationnaire et embarqué, perspectives pour le marché, les technologies et le paysage concurrentiel à l'horizon 2020" 
Auteur : Pierre Paturel