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Effets délétères de la pollution de l’air intérieur sur la peau
Quand on parle d’impacts sanitaires de la pollution de l’air, on fait en général référence aux risques d’augmentation de pathologies respiratoires ou cardiovasculaires. On pense de fait moins spontanément aux problématiques cutanées, même si celles-ci sont évoquées (et combattues) par la filière cosmétique. Et ce domaine très spécifique des impacts sanitaires de la pollution de l’air sur la peau est encore moins cerné dans le cas des polluants de l’air intérieur, ces composés organiques volatils dégagés par les matériaux de constructions, d’aménagement intérieur, le chauffage, la cuisson ou certains produits de bricolage ou d’entretien. Or comme viennent de le démontrer Anne-Laure Bulteau et Sylvie Lacombe dans leur étude publiée dans Scientific Reports en septembre, il existe un mécanisme d’action de ces polluants sur les cellules de l’épiderme qui peut avoir des effets délétères sur le vieillissement de la peau et sur sa capacité à se défendre contre certains stress.
Les chercheuses ont mis au point un montage constitué d’une enceinte étanche pour exposer des kératinocytes (les cellules qui constituent 90 % de l’épiderme, mais aussi des cheveux, des poils ou des ongles) et des modèles de peaux humaines à des concentrations stables de COV représentatifs de la pollution de l’air intérieur (acétaldéhyde, formaldéhyde, acétone, hexane et toluène). L’idée a été de reproduire une exposition chronique pour étudier les impacts. Grâce à ce dispositif, les deux chercheuses ont pu montrer que cette exposition entraînait une baisse significative de la survie cellulaire des kératinocytes et des cellules de la peau. Le phénomène en jeu comprend un stress oxydatif conduisant à des dommages à l’ADN et aux protéines, mais surtout une altération significative de la machinerie d’élimination des protéines cellulaires. Cette machinerie, qu’on appelle protéasome, joue un rôle déterminant dans un grand nombre de processus cellulaires, en particulier dans la réponse aux stress. Concrètement, elle assure l’élimination des protéines endommagées qui sont dans la cellule et joue ainsi un rôle de nettoyage avec recyclage des acides aminés pour la formation de nouvelles protéines. Or l’oxydation des protéines est l’une des principales causes du vieillissement cellulaire et des maladies associées. Donc si ce processus naturel de nettoyage est altéré, le vieillissement de la peau s’en trouve potentiellement accentué. Cette compréhension de l’impact de l’environnement aérien sur le maintien de l’équilibre cellulaire (ce qu’on appelle l’homéostasie, système de maintien de l’équilibre entre le milieu intérieur par rapport aux contraintes extérieures) est donc primordial pour envisager, parallèlement à la baisse des expositions, des solutions protectrices et réparatrices pour rétablir ce mécanisme de régulation cellulaire. C’est d’autant plus important qu’il ne s’agit pas d’une « simple » problématique de « vieillissement » mais aussi de survenue de pathologies. L’étude développée par les deux chercheuses françaises prend notamment l’exemple d’une molécule en particulier, l’E-Cadhérine, qui joue un rôle important dans la maintenance des épithéliums et la réparation tissulaire, que ce soit dans des cas normaux ou pathologiques (inflammation, cancer). Or l’expression de cette molécule est réprimée par l’exposition chronique aux COV, d’où des effets délétères sur le maintien des fonctions protectrices de la peau.
* travaux menés aussi en collaboration avec Carine Nizard, de LVMH Recherche.
Contacts :Anne-Laure Bulteau, anne-laure.bulteau@ens-lyon.fr
Sylvie Lacombe, sylvie.lacombe@univ-pau.fr
Carine Nizard (LVMH), cnizard@research.lvmh-pc.com