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12/11/2021

> Editorial

Pots de yaourt, méthanisation... élargissons nos perspectives !

Impossible de ne pas réagir à l’émission Cash Investigation d’hier soir. Pour démotiver les citoyens ou alimenter un climat de suspicion permanente, le pari était réussi. C’est le jeu de ce type de format, très scénarisé, voire théâtral… Mais quel dommage de restreindre comme cela l’angle de vue sur les filières de traitement des déchets…

Revenons sur l’exemple des pots de yaourt qui sont effectivement un bon exemple de la complexité des problématiques de recyclage de notre société. Mais pourquoi faire un sujet aussi partiel (pour ne pas dire partial) sur ces questions de recyclage ? D'abord parce qu'effectivement, il existe des solutions technologiques qui se construisent pour recycler avec plus de valeur ajoutée les pots de yaourts et autres emballages contenant du polystyèrene. Merci à Polystyvert de le rappeler dès ce matin dans quelques messages sur les réseaux sociaux mais on aurait pu tout aussi bien pu citer les initiatives menées au niveau de la filière tout entière pour structurer rapidement des solutions de recyclage avancé (Consortium PS25 créé il y a un an, le procédé de Total à Carling etc.). Pourquoi aussi dénigrer les filières de recyclage déjà en place. Si les débouchés ne sont pas encore à grande valeur ajoutée, c'est la feuille de route naturelle de toutes les filières : toutes les filières du plastique ont démarré avec des usages moins exigeants avant d'arriver à produire des matières recyclées gagnant en performances ! Quand on voit aujourd’hui de nouvelles initiatives sur les films d’emballage (Reborn vient de présenter son unité de désencrage des films plastiques imprimés post-consommation, permettant de produire de nouveaux films transparents pour l’emballage) ou de multiples flux complexes (voir par exemple le savoir-faire de Cycl’add qui rebooste les plastiques recyclés grâce à d’autres déchets…), sans compter les multiples innovations qui se font jour pour séparer les matériaux des emballages multicouches, on aurait pu tant communiquer sur les progrès en cours… tout autant d’ailleurs aussi sur les multiples travaux menés sur des solutions d’éco-conception des emballages permettant de limiter leur complexité.

Question volume, on nous dit en s’effarant que seulement 30 % de pots de yaourts sont recyclés. Pourquoi ne pas voir le "pot" à tiers plein...? Rappelons que l'extension de collecte (qui permet d'intégrer ces pots de yaourt dans la poubelle des « recyclables ») est encore récente même si elle monte très rapidement en puissance depuis trois ans. L'enjeu est donc d'abord de créer le bon geste de tri pour massifier ces flux, ce qui est essentiel pour la mise en place de filières de recyclage à plus forte valeur ajoutée qui nécessitent aussi du fait de leur complexité des investissements massifs et donc des flux plus importants pour atteindre une viabilité économique. Citéo ne s’est jamais caché dans ses communications que le travail de développement sur les débouchés se faisait parallèlement à cette montée de la collecte.

Je ne m’attarderai pas sur la vision stéréotypée de l’incinération et la valorisation énergétique, et sur le mauvais procès sur la mauvaise terminologie employée pour qualifier la valorisation des mâchefers. Mais je ne peux m’empêcher d’ajouter un mot sur le parti-pris alarmant sur la méthanisation… Certes les situations décrites sont sans doute réelles et mettent le doigt sur la nécessité de gagner en rigueur, mais cette vision peut-elle être généralisée pour autant ? Elle est en tous cas loin de l’expertise réelle de cette filière, de ses évolutions techniques et de son potentiel, bénéfique pour le climat et pour l’indépendance énergétique. A l’heure où on se plaint à tour de bras de la flambée des prix des énergies fossiles, il n’est pas sûr qu’il soit constructif de parler de « polémique » à propos des filières des gaz renouvelables. C’est méconnaître toute la dynamique d’innovation et saper les futurs projets, notamment toutes les démarches de micro-méthanisation qui sont en train de se structurer pour répondre aux futurs besoins de traitement des biodéchets des ménages (dont la collecte sera obligatoire en 2024).

Depuis 33 ans que je fais de la veille technologique en environnement, je vois pour ma part avant tout la créativité intarissable de nos entreprises, en France, en Europe et ailleurs dans le monde, pour trouver des solutions efficaces et de plus en plus économiquement viables à tous ces problèmes environnementaux. Chaque jour, je découvre de nouveaux acteurs, des projets de R&D et des développements industriels .. au point qu’il est difficile de tout couvrir pour mes lecteurs. Je préfère de loin me faire l’écho de tout ce potentiel, que chercher les « bons » et les « mauvais » élèves, opposer les filières. Sans naïveté sur les progrès que chacun doit faire pour rendre ces filières plus sûres, plus efficaces, plus pertinentes, c’est autrement plus enthousiasmant… et rassurant pour notre avenir.

Alors continuons de mettre nos pots de yaourt dans le bac des recyclables …et tout ce qu’on nous demandera d’y mettre (et notamment prochainement nos biodéchets), continuons d'être rigoureux sur ce qu’on jette dans la poubelle grise destinée à l’incinération (les résidus de métaux lourds, c’est d’abord notre responsabilité) car sans ces premiers gestes dont nous sommes tous responsables, c’est sûr que la valorisation et le recyclage, quels qu’ils soient, ne se feront pas.

Cécile Clicquot de Mentque

Rédactrice en chef

Green News Techno